La formidable découverte de l’existence du code génétique inscrit dans l’ADN et le décodage de son langage a popularisé l’idée que le fonctionnement du corps est programmé. Comme si nous avions un ordinateur dans nos cellules, qui déterminerait la fabrication de nos cellules et hormones, déclencherait nos maladies, et pourquoi pas, programmerait nos sentiments et nos pensées. Selon cette vision, nous ne serions pas responsables de notre vie puisqu’elle serait déterminée génétiquement, indépendamment de notre volonté. Nous ne serions là que pour subir notre destinée biologique sans possibilité de la changer.
Or cette représentation est fausse.
Le code génétique constitue seulement un stock d’informations et une potentialité. Un gène peut être activé ou désactivé. La mise en œuvre de l’instruction portée par un gène (les biologistes emploient le terme d’expression du gène) se déclenche seulement si elle en reçoit l’ordre et si on lui en fournit l’énergie. Si l’on reprend l’image de l’ordinateur dans notre corps, le code génétique est un ensemble de programmes ou d’outils qui peuvent être utilisés ou non, selon les circonstances et les besoins.
L’idée couramment répandue qu’il existerait des gènes pour les principales caractéristiques structurales et fonctionnelles d’un être vivant est erronée.
Tout ce que disent les très nombreuses expériences des généticiens, c’est simplement que la modification de gènes particuliers peut avoir des conséquences précises sur ces différentes caractéristiques.
Les gènes ne sont qu’une mémoire, qui permet de fabriquer les composants essentiels du vivant que sont les protéines.
Le séquençage récent du génome humain a révélé que le nombre de gènes est relativement restreint, moins de 30’000, pas plus qu’une plante! C’est bien peu pour expliquer la complexité du fonctionnement du corps. Il faut donc s’attendre à ce que d’autres mécanismes interviennent pour créer la diversité d’apparence, de comportement et d’expression des individus.
La société américaine connait un formidable engouement pour les gènes et les interprétations biologiques des comportements. Les références aux traits génétiques abondent dans les feuilletons, les téléfilms, les films, la presse, les magazines féminins,… ou dans le discours politique… Ce fantasme de la toute puissance du gène n’a guère cours qu’au sein d’une minorité de chercheurs, mais leur discours est souvent entendu par les politiques et relayé sous forme de lieux communs par les médias et les propos de café. Ils font aussitôt la une des journaux mais leur réfutation est plus discrète, voire sans incidence sur ces mêmes médias. (David LE BRETON Professeur de sociologie, Université de Strasbourg)
Ce cadre de pensée [du déterminisme génétique] a dominé les trente dernières années et a culminé avec le projet Génome humain. Il suffirait de déchiffrer ce «programme» pour comprendre la totalité de la nature d’un organisme. Mais l’idée que «tout est génétique» commence à être sérieusement ébranlée.
On sait maintenant que n’importe quel ADN peut être lu et interprété par n’importe quelle cellule, ce qui ramène l’ADN à de simples données interprétables par des «machines cellulaires» très différentes.
L’important, c’est l’environnement cellulaire plus que l’ADN.
Il est clair que le nombre de gènes qui codent pour des protéines n’est pas en rapport avec la complexité relative. Par exemple, un simple ver nématode avec seulement 1000 cellules a presque autant de gènes codant pour des protéines (~ 19’300) que les humains et d’autres vertébrés (~ 20’000). Aussi, il doit y avoir un large ensemble d’informations additionnelles importantes, probablement pour la plupart de l’information de régulation, qui se tient en-dehors des frontières des exons des gènes conventionnels. (J. Mattick, The Human Genome: RNA Machine – The Scientist, 2007)
Si les organismes étaient entièrement programmés par le code génétique de l’ADN, alors tous les organismes possédant le même ADN et le même code (plantes issues de graines semblables, clones, jumeaux), toutes les cellules possédant le même ADN et le même code (celles qui appartiennent au même organisme) devraient se développer et se comporter de manière strictement identique. Or quelques observations toutes simples nous convaincront que des codes génétiques identiques peuvent s’exprimer et donner lieu à des manifestations variées selon l’environnement de l’organisme.
La croissance d’un organisme dépend donc à la fois du code génétique et de sa mise en œuvre par des facteurs environnementaux adéquats (eau, nourriture, soins, etc.).
On peut comparer les instructions génétiques au plan d’un architecte. Celui-ci reste abstrait tant que les ouvriers ne sont pas présents et opérationnels, qu’ils ne disposent pas des outils et des matériaux nécessaires, et qu’ils ne lisent pas les instructions du plan. Dans le domaine biologique, le plan comporte de nombreuses options car il prévoit diverses circonstances en fonction du terrain et des matériaux. Donc, selon les matériaux, selon l’ardeur des ouvriers et selon le terrain, le bâtiment sera construit d’une façon ou d’une autre.
L’épigénétique, complément de la génétique
L’épigénétique étudie les modifications de l’ADN qui n’affectent pas la séquence des gènes: changement de position, associations avec d’autres molécules. Elle examine comment ces modifications sont susceptibles de désactiver ou d’activer les gènes. C’est la génétique de la « surface » (épi-) de la molécule.
L’ADN est comme une bande magnétique porteuse d’information, mais qui ne sert à rien sans magnétophone. L’épigénétique joue en quelque sorte le rôle du magnétophone. (Bryan Turner, Birmingham, RU)
Nos expériences de vie affectent l’état des gènes
Jusqu’à une époque récente, les scientifiques, relayés par la presse et les médias, considéraient que des maladies telles que cancers, diabètes, schizophrénie et autres étaient programmées par nos gènes et inéluctables, à moins de modifier les gènes par drogues, irradiation ou thérapie génique. Or pour le commun des mortels, c’est une évidence que notre santé dépend de la qualité de l’air que nous respirons, de notre alimentation, de la consommation de tabac, drogues et produits toxiques, de l’exercice physique, de nos tensions mentales, des stress que nous subissons, de l’amour que nous recevons.
Depuis quelques années, la science démontre le bien-fondé de ce point de vue. Il y a une accumulation de preuves scientifiques sur le fait que la qualité de l’environnement et le vécu psychologique modifient l’état des gènes par la voie épigénétique, en les activant ou les désactivant.
Beaucoup de généticiens pensent désormais que le comportement de nos gènes peut être modifié par les expériences de la vie, et même que ces changements peuvent être transmis aux générations futures. Cette constatation peut transformer notre compréhension de l’hérédité et de l’évolution. (Dr. Mae-Wan Ho, De quoi les gènes se souviennent-ils? Prospect Magazine, 2008)
La configuration épigénétique, un ensemble de commutateurs modifiables
Le fonctionnement de notre corps est régi à la fois par le code génétique – un stock de gènes – et par la configuration épigénétique (on dit aussi empreinte génomique) – un ensemble de commutateurs qui activent ou désactivent ces gènes. Le fonctionnement sain du corps avec tout son potentiel de vitalité et de développement est assuré par une configuration optimale de l’état des commutateurs pour un individu et à un moment donné.
Le fait que l’environnement altère la configuration démontre à l’évidence qu’une configuration n’est pas immuable. Il faut insister sur cette caractéristique. Il suffit de changer des conditions de vie (alimentation, respiration, exercice physique, stress) pour qu’elle se dégrade. Mais alors, c’est également vrai dans l’autre sens. Une configuration épigénétique qui n’assure pas une bonne santé peut être modifiée et améliorée par une bonne hygiène de vie et une thérapie en conscience.
Hérédité et transmission
Rachel Yehuda, psychologue à l’école de médecine de Mount Sinai à New York, et le Dr Jonathan Seckl, résidant à Edinburgh en Écosse, se sont penchés sur le stress subi par des femmes enceintes se trouvant dans ou à proximité du World Trade Center à New York au moment de leur effondrement provoqué le 11 septembre 2001. Ils ont mesuré le taux de cortisol, indice du niveau de stress (appelé par les scientifiques État de Stress Post-Traumatique ou PTSD). Chez l’enfant un fois né, ils ont trouvé un taux de cortisol plus élevé, prouvant que l’état de stress était transmis à l’enfant.
Toutefois, dans ce cas, on peut aussi suggérer que les enfants ont été imprégnés directement par le stress en tant que fœtus. Or, R. Yehuda a également étudié des personnes qui ont survécu aux camps de concentration lors de l’holocauste, et leurs enfants nés bien après. Elle a découvert que la fréquence des PTSD chez ces enfants est beaucoup plus importante (trois fois plus) que dans la population générale. Or ces enfants, aujourd’hui adultes, n’ont pas connu les camps en dehors de ce qu’on leur en a dit. Ils n’ont pas été plus exposés à des événements traumatiques que la population normale. Est-ce dû au fait que les traumatismes ont été évoqués devant eux par leurs parents? Si cela est en partie vrai, cela ne peut expliquer tous les cas. Car même des bébés de moins d’un an, à qui on n’a pas encore parlé des événements, présentent ce taux élevé de cortisol.
L’état de stress chez ces personnes est donc directement lié au traumatisme psychique antérieur chez leurs parents. Elle a été transmise en l’absence de tout événement traumatique chez les enfants par des voies épigénétiques.
L’ADN changeant et modulable
À ce stade de l’article, notre image de l’ADN est un assemblage linéaire de gènes et de zones non codantes, avec des gènes qui peuvent être allumés ou non. Toutefois, nous imaginons habituellement que cet assemblage est aussi fixe qu’une charpente, ou plutôt qu’une chaine de maillons métalliques si bien accrochés les uns aux autres qu’ils ne peuvent pas se détacher et migrer. Or c’est pourtant le cas.
Au cours des processus de croissance et de renouvellement des cellules, des fragments d’ADN peuvent changer de place, l’ADN peut se recomposer, le code génétique peut subir des modifications.
Dans le processus de transposition, un fragment d’ADN appelé transposon se détache ou se recopie, puis va se replacer dans un autre endroit du génome. Cela crée des réarrangements ou recombinaisons chromosomiques. Le nouvel endroit du génome se situe dans une partie codante ou non codante, sur le même brin d’ADN ou sur un autre. Le transposon est aussi nommé élément mobile ou élément transposable; également gène sauteur ou gène mobile, s’il est un gène.
Une partie importante de l’ADN est composée d’éléments transposables. Chez l’homme, ils constituent plus de 40 % du génome. Lorsqu’on sait que les gènes ne constituent environ que 5% du génome, cela signifie que la plupart des transposons sont localisés dans les parties non-codantes, en-dehors des gènes.
Toutefois, une partie de ces éléments sont localisés dans des parties codantes, ou s’y insèrent par transposition, ce qui modifie le code génétique et la fabrication de certaines protéines.
La modification des parties non-codantes n’est pas sans conséquence. Jusqu’à une époque récente, on pensait que ces parties étaient inutiles (!!!). On commence seulement à comprendre que même si elles ne portent pas de code pour les protéines, elles ont d’autres fonctions indispensables.
Activez l’ADN que vous voulez
Puisque l’expression de notre code génétique dépend de la façon dont nous vivons, cela change complètement notre rapport avec l’ADN. Il n’est plus suffisant de nous dire que tout est joué d’avance et qu’il n’y a plus qu’à subir notre destinée, y compris les maladies. Nous sommes responsables de la bonne utilisation de notre ADN. C’est en nous nourrissant correctement, en respirant largement, en apprenant à être décontracté, bref en sachant utiliser à bon escient tous les facteurs de santé que nous pouvons nous constituer un épigénome favorable à notre santé et notre épanouissement.
Dans ces facteurs de santé, il faut inclure notre façon de penser. Nos stress sont directement liés à la façon dont nous appréhendons la vie. Nos peurs, angoisses, inhibitions sont créées par les pensées que nous avons vis à vis des évènements que nous vivons. Nos pensées agissent donc sur notre ADN. Nous pouvons apprendre à diriger nos pensées pour créer la confiance en nous-mêmes et en la vie, et retrouver notre plein potentiel de créativité et d’action.
Notre responsabilité s’étend également à la santé de nos enfants et de nos petits-enfants puisque la qualité de notre épigénome est susceptible de leur être transmise.
Cela est surtout important avant la conception de l’enfant et pendant sa vie intra-utérine. Ceux qui s’intéressent aux moyens naturels de santé et à la préparation naturelle à la naissance ne seront pas étonnés. Mais il est intéressant de noter que la science valide cette influence et en précise le processus au niveau moléculaire.
L’épigénétique est maintenant relativement bien connue et acceptée chez les scientifiques, et pas seulement par les pionniers. Mais curieusement, la presse et les médias en parlent très peu. Même les généreux sites-web éducatifs sur l’ADN et l’hérédité se limitent à la pensée dominante du code génétique et de son déterminisme.
Le but sera toujours de vous cacher l’importance de votre pouvoir personnel de guérison et de transmutation…
Extrait de « L’ADN ET SES MODES D’EXPRESSION’ par Alain Boudet
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